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Les livres des autres et moi
1 avril 2010

Daniel Pennac, Gide, Harry Potter et moi

01/04/2010

Daniel Pennac, Gide, Harry Potter et moi

Je me choisis mes passions comme d’autres se choisissent un look. Je m’en souviens encore, du jour où j’ai décidé que j’aimerais la littérature. J’avais douze ans et j’avais jamais lu un livre en entier. La lecture, je trouvais ça chiant. Mais en même temps, vaguement, je trouvais ça classe.

J’avais une mère qui lisait, mais pas tant que ça. Un père qui faisait pas la différence entre un Dostoïevski et un Marc Lévy et qui s’en foutait. Qui s’en fout toujours d’ailleurs. Ils avaient quand même voulu me faire lire, en bons parents concernés par le développement intellectuel de leur fille. Ils m’avaient donné des « classiques ». Sans succès. J’ai mis un an et demi à ne pas lire Les Malheurs de Sophie. Déception parentale.

Et puis un jour, pour l’école, j’ai dû lire L’Oeil du Loup de Pennac. C’était la première fois qu’on m’obligeait à lire un livre en entier. J’étais une petite fille modèle, je faisais ce qu’on me disait, j’ai lu. De la première à la dernière page – il y en avait au moins 70 ! Et j’ai été fascinée. Par l’histoire, bien sûr. Mais au moins autant par la facilité avec laquelle je l’avais lu ce bouquin, d’un bout à l’autre. J’étais fière. Je me revois dans mon lit, en train de le lire pour la deuxième fois. Je m’émerveillais moi-même. Ce soir-là, j’ai décidé que dorénavant j'aimais lire.

Je me vois encore, à 14 ans peut-être, en train de lire un Gide – je me rappelle plus lequel – dans la cour du collège. J’avais des amis pourtant. Pas nombreux, pas très intéressants, mais ils me préservaient de la honte d’avoir à manger toute seule à la cantine. Mais de temps en temps, je les laissais et je lisais comme ça, au milieu de la cour, bien en vue. J’aimais bien Gide, mais ce que j’aimais encore plus, c’était de me dire : « Je lis Gide dans la cour ; les autres, autour de moi, ils savent même pas qui c’est Gide » (avec le recul, je me rends compte que moi non plus je savais pas qui c’était Gide). Y’en avait qui se moquaient de moi, mais je m’en fichais. Je me sentais supérieure.

Un ou deux ans plus tard, autour de moi on lisait les premiers Harry Potter. Moi pas. Je voulais être snob. Je lisais du Gide, du Zola, du Dostoïevski. J’ai ouvert mon premier Harry Potter à peu près cinq ans après tout le monde. Quand je suis devenue moins snob. J’ai trouvé ça génial. Mais je l’ai pas dit trop fort.

Ma passion pour la lecture, ça a d’abord été de la vanité. Ensuite, insensiblement, c’est devenu de l’amour.

Je ne sais pas s’il y a une mauvaise façon de venir à la lecture. Mais s’il y en a jamais eu une, ça a indubitablement été la mienne.

Cérynie

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